La belle mère à la barre

Article : La belle mère à la barre
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14 décembre 2016

La belle mère à la barre

Victime d’abus de confiance et de voie de fait, Kiatou D traîne les enfants de son défunt mari devant le tribunal de la commune II du district de Bamako. La plaignante se défend comme elle peut face à des héritiers décidés à la mettre à la porte.

La confiance ne s’accorde plus aisément de nos jours. Elle peut donner souvent lieu à un procès lorsqu’elle est abusée. Habillée dans un ensemble orange et un foulard bleu tombant sur son épaule gauche, Kiatou D dans un geste désinvolte replace son sac sur son épaule droite toutes les cinq secondes. Très excitée, elle s’adresse au juge Mamadou Sylla assis de l’autre côté de la barre. « Apres la mort de mon mari, j’ai remis sa carte bancaire à Aboulaye T, son fils aîné pour qu’il la garde en sécurité. J’ai appris plus tard, qu’il a retiré chaque mois la pension de son père sans que je ne le sache », explique Kiatou D. « Ah bon ? » laisse entendre le juge qui reprend ensuite les dits de Kiatou D pour que le public comprenne clairement la situation. « Merci ! C’est exactement ça ! », reprend Kiatou D comme pour signifier au juge qu’il est bien dans les faits. De temps en temps, Kiatou D murmure dans les oreilles du plus jeune de ses avocats. Elle l’aide surement a bien préparé sa défense. « Sa sœur, elle me mène la vie dure chez moi », affirme la plaignante. Un ronronnement assourdissant parcours la salle d’audience. « Silence ! », égosille le garde debout devant la porte d’entrée.

Barre des témoins du tribunal.

Moussa T dit Boua est décédé en avril 2013 en France où il s’est rendu pour les soins. Marié à Kiatou D en 2008 avec qui il n’aura pas d’enfant, Boua est décédé pendant sa retraite. Par le passé, le défunt a eu deux familles ; une au Mali et une autre en France. Divorcé d’avec sa première épouse depuis 1977, Moussa T a eu quatre enfants avec sa première femme dont Aboulaye T.

Kiatou D continue, « depuis la mort de Boua, personne ne s’est jamais préoccupée de moi. Ma nourriture, mes frais d’électricité, j’ai dû y faire face moi-même. Pendant, ce temps, Aboulaye T retire chaque mois la pension de mon mari », assène-t-elle. Plus de 6 millions de Fcfa précisément soit 400 000 Fcfa chaque mois depuis avril 2013, indique l’assignation élaborée par les avocats de la plaignante. « Ce n’est pas tout, lui (Aboulaye T) et sa sœur Kadiatou T, (debout également à la barre au côté de son frère) veulent me faire quitter la maison où j’ai vécu tout ce temps avec Boua », déclare-t-elle en pointant l’index droit en direction de Kadiatou T qui sans lui jeter un regard, hoche lentement la tête en signe de protestation. La plaignante ne s’arrête pas pour autant, « elle vit chez moi et m’a interdit l’accès à la cuisine. De mèche avec Aboulaye, elle m’a coupé l’électricité. J’ai dû m’installer un nouveau compteur »,  « Ah bon ? » questionne du regard le juge. Et de reprendre une fois de plus les dits de la plaignante. « Merci ! », enchaîne Kiatou D, visiblement satisfaite que le juge partage ses émotions. Encore fallait-il s’en assurer. Elle enchaîne, « elle m’a rendu la vie infernale, infernale et infernale », assène-t-elle en défiant Kadiatou T du regard. « Oh là madame, c’est à moi que vous devez vous adresser et à personne d’autre. On n’est pas dans une arène ici alors modérez vos propos ! », rappelle à l’ordre le juge. « D’accord maître ! Pardon !», s’excuse-t-elle. « C’est président ! » reprend le juge. « D’accord, d’accord président », reprend-t-elle au bout d’un sourire forcé. « Avez-vous des questions maîtres ? », lance le juge aux avocats de la défense qui en cœur répondent ensemble « non ! »

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